Promue par l’AP-HP, l’étude CHARMED a été menée dans six services d’accueil des urgences, dont cinq de l’AP-HP (Avicenne, Lariboisière, Hôpital européen Georges-Pompidou, Saint-Antoine et Tenon) et le centre hospitalo-universitaire Grenoble-Alpes, avec l’aide de la plateforme de recherche clinique des Hôpitaux Universitaires de l’Est parisien AP-HP du Pr Tabassome Simon.
Pilotée par le Dr Yonathan Freund, du service d’accueil des urgences de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière AP-HP et de la faculté de Médecine de Sorbonne Université, cette étude montre, pour la première fois au monde, une diminution du taux d’erreur médicale aux urgences, grâce à des vérifications croisées régulières et systématiques entre médecins. Ces résultats font l’objet d’une publication dans la revue JAMA Internal Medicine le 23 avril 2018.
Dans les services d’accueil des urgences, les médecins sont souvent amenés à suivre plusieurs patients en même temps et à prendre rapidement des décisions à partir d’informations ou de résultats encore partiels. Ils sont donc particulièrement exposés au risque d’erreur médicale. Une première étude en 2013 a ainsi évalué à 10% le taux d’erreur médicale aux urgences*.
Cette étude suggérait également que ce risque d’erreur médicale diminuerait lorsque plus d’un médecin était impliqué dans la prise en charge du patient, comme par exemple lors des transmissions médicales.
Les erreurs médicales sont classées en fonction de leur gravité :
> L’événement indésirable sans conséquence sur la santé du patient (ou « Near Miss ») ;
> L’événement indésirable grave entraînant des dommages temporaires ou définitifs sur le patient (réaction transitoire, prolongation d’hospitalisation, séquelle définitive…).
Ces erreurs peuvent avoir des origines diverses : erreur de diagnostic ou de posologie d’un traitement, retard de prise en charge, réalisation d’un examen complémentaire non indiqué…
Coordonnée par le Dr Yonathan Freund, du service d’accueil des urgences de l’hôpital de Pitié-Salpêtrière AP-HP et de la faculté de médecine Sorbonne université, cette nouvelle étude randomisée en cluster CHARMED (pour « Cross-checking to reduce adverse events resulting from medical errors in the emergency department ») avait pour objectif d’évaluer l’impact des vérifications croisées régulières systématiques (ou « Cross-checking ») entre médecins sur le taux d’erreur médicale enregistré aux urgences.
Sur la période de l’étude (décomposée en deux périodes de dix jours), 1680 dossiers de patients pris en charge dans six services d’accueil d’urgence ont été tirés au sort et analysés afin de détecter d’éventuelles erreurs médicales ou événements indésirables.
Le taux d’erreur médicale recensé était de 10,7% dans le groupe contrôle (soit 90 erreurs médicales recensées pour 840 dossiers de patients étudiés) contre 6,4% dans le groupe où des vérifications croisées régulières avaient été réalisées (soit 54 erreurs médicales relevées dans 840 dossiers de patient étudiés). Ces vérifications croisées ont consisté pour les médecins à se retrouver trois fois par jour, pendant une dizaine de minutes, deux par deux, afin d’échanger sur l’état de santé et la prise en charge de leurs patients.
55% des erreurs médicales relevées étaient sans gravité pour les patients.
Un peu plus des deux tiers des événements indésirables graves recensés ont entraîné des dommages temporaires ou ont nécessité une hospitalisation ou sa prolongation ; le tiers restant des EIG ont conduit à des dommages définitifs.
On note une réduction relative de 40% des erreurs médicales (plus particulièrement une diminution de 47% des erreurs sans gravité et de 29% des événements indésirables graves) lorsque des vérifications croisées systématiques sont faites entre les médecins.
L’étude CHARMED est ainsi la première étude au monde à montrer une réduction du taux d’erreur médicale aux urgences, grâce à la mise en place de ces vérifications croisées régulières entre médecins.
Ces vérifications croisées sont déjà pratiquées par certains services d’urgences de l’AP-HP, de façon formalisée ou non. L’AP-HP envisage de diffuser des recommandations visant à les étendre à l’ensemble de ses services d’urgence.
*Freund Y, Goulet H, Bokobza J, et al. Factors associated with adverse events resulting from medical errors in the emergency department : two work better than one. J Emerg Med. 2013;45(2):157-162. doi:10.1136/bmj.i2139
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